Le double mouvement du funambule.
L'hiver a remarquablement fait son travail. Plus une seule feuille aux arbres caducs et une herbe jaunie... Tout un labeur invisible qui absorbe une transformation nécessaire à la poursuite de la vie, à l'éclosion d'une nouvelle saison.
J'admire en ce monde végétal cette capacité donnée dans l'abandon, l'exemple du détachement. A-t-on déjà entendu arbre se plaindre ou rosier pleurer de devoir se résoudre à ne plus donner ces belles créatures ?
Dans les paysages redessinés par ce dépouillement, la vue se transforme et nous montre des réalités cachées par l'opulence des saisons précédentes.
Comme ce travail de détachement, d'acceptation nous est difficile ? Lâcher nos repères, nos habitudes... Accepter de se laisser transformer par ce mouvement intérieur...
Ne sommes-nous pas entrain d'assister un peu hébétés à un tournant de notre monde ? Qu'allons-nous accepter d'abandonner pour le bien de tous ? Quelles nouvelles visions viendront alors ? Quel dépouillement collectif devrons-nous réaliser pour que d'autres saisons de la terre puissent avoir lieu partout dans le monde ?
Quelles forces en secret travaillent à notre insu et quelles forces de conscience devons-nous déployer pour qu'advienne un nouveau soleil brillant sur une terre plus humaine et plus belle encore ?
Je nous vois comme une foule de funambules dans ce mouvement incertain entre l'ancien monde qui va droit dans le mur et ce nouveau que nous ne discernons pas complétement. Funambules inconscients, funambules égarés, funambules balbutiant, funambules rayonnant... Nous avons ce double mouvement à opérer entre l'abandon confiant aux forces du cosmos et le vouloir d'un mieux être et d'un mieux aimer irrésistible pour qu'advienne une nouvelle saison, celle d'une humanité transformée.