Verrons-nous le bout du tunnel ?

par poutouxvero.over-blog.com  -  13 Décembre 2020, 23:42  -  #Atout humanité

 

Cette formule est sans doute partagée par nous tous, en ces jours sombres. Alors que la lumière est parcimonieuse et que nos ciels sont bas et gris ; alors que nous traversons tous cette "crise" qui nous ôte la vision de ce qui suivra, qui semble nous placer dans le non-sens, sans boussole, cette expérience ancienne m'est revenue, la voici donc :

Nous randonnions au fond d'un canyon et la description de l'itinéraire avait bien précisé de s'équiper d'une lampe de poche car nous devions parcourir un tunnel long, sous la montagne. Imprudents et jeunes, c'était notre cas, nous voilà à l'entrée du tunnel, nous apercevant alors de notre oubli. Allait- il être fatal, nous obligeant à faire demi-tour ? Pourrions-nous quand même poursuivre notre chemin ?

Nous n'avons pas hésité très longtemps et, nous tenant la main, il est vrai que cela était alors si naturel, nous avons commencé à avancer. La lumière était encore là, dans notre dos. Le frais des pierres se faisait de plus en plus sentir ainsi que cette odeur de la terre des profondeurs, de cet enfouissement dans lequel nous pénétrions. Nous ralentissions nos pas, commençant à toucher le sol avec nos pieds, comme nous pouvions... Tâter ce sol, écouter avec ses pieds. Se laisser guider par une de nos mains qui suivait aussi l'arrondi des pierres. Puis ce fut le noir total. Plus de filet de lumière éclairant par derrière ; pas un seul grain de lumière en avant. Pas de panique non plus. Juste poser précautionneusement un pied, puis l’autre ; se laisser guider par nos mains réunies et celle qui semblait suivre un fil invisible. Quelques minutes sans doute, mais en fait le temps n'existait plus. C'était l'attente lente et mesurée, certaine de sa prochaine rencontre qui nous aspirait, sans que nous le sachions. Une totalité d'être dans ce noir d'encre et puis ELLE FUT, si fragile, presque comme une illusion. Nous n'avons pas accéléré, nous voulions contempler pleinement cette venue délicate d'abord, puis un peu plus diffuse et enfin éclatante. Comme un aveuglement qui nous arrête. Comme un silence inhabituel qui nous habite.
Sur le moment, nous étions d’abord heureux d'avoir franchi ensemble cette petite épreuve. Alors que la nuit allait tomber, avec un ciel bien dégagé, nous étions encore habités par cette rencontre du noir et ce qu'elle avait réuni en nous.

Aujourd'hui, ce souvenir revient. Je ressens à nouveau cet enfoncement dans quelque chose que je ne connais pas. Je sens cette lumière qui va, disparaissant peu à peu, normal en cette saison. 

Aussi imprudents que notre jeunesse, l'humanité entière s'est trouvée face à ce mal prévu (mais oui, depuis combien de temps, avons-nous cette sensation de foncer droit dans le mur !)  Et chaque quidam se sentait bien impuissant pour stopper nos actes parfois inconséquents. Nous avons été pris au dépourvu, sans notice explicative et sans recommandation...

Et pourtant, nous continuons d'avancer, de vivre plus ou moins bien chaque jour qui vient, plus conscient des gestes que nous faisons, des actions à mener... Si nous ne sommes pas encore dans ce noir total, et je pense à tous ceux et celles qui en sont si proches, alors ce qui compte vraiment, c'est de savoir qu'un grain de lumière suivi de milliers d'autres va venir en nos cœurs délicatement d'abord, puis se répandre comme une nouvelle fontaine. Oui, nous allons traverser ce tunnel, sans lampe de poche, guidés seulement par une force plus grande que nous ... Celle qui met en musique nos ciels d'hiver et les emporte toujours vers un autre printemps. Il nous faut expérimenter pleinement l'attente et avancer ensemble, se laissant guider par ce fil invisible qui nous aspirait dans ce tunnel, apprenant à écouter autrement les vrais bruits du vivant. Nous n'en serons que plus vivants ! 

 

photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.
photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.
photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.

photographie des vitraux de Claude Baillon( 2011) Chapelle et chateau de Coste Gozon.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
V
grand merci Véronique pour ces beaux partages, particulièrement celui-ci d'une grande profondeur<br /> je t'embrasse Christiane
Répondre