Il y a une pivoine blanche.

En face de l'entrée des urgences d'un grand hôpital parisien, sous une bouche de ventilation de l'immeuble qui est sur l'autre trottoir, l'homme tout de noir vêtu dort à même le sol, la tête entre ses bras, sur le bitume. Quelques gouttes de pluie tombent silencieuses.

Voitures, vélos, piétons, nous passons tous et ne pouvons pas ne pas le voir. Je passe aussi, apparemment indifférente...

Je me demande s'il est bien vivant...

L'image de son corps endormi au milieu du monde s'inscrit en moi et sonne notre lâcheté , notre indifférence, notre impuissance.

Quelques heures plus tard, quelques centaines de mètres plus loin, je suis au milieu d'un jardin parisien, entouré de grands murs. Il y a des tilleuls, des platanes, des marronniers en fleurs. Il y a un beau rayon de soleil qui réchauffe. Les rosiers sont entrain d'éclore...

Il y a une pivoine blanche aux larges fleurs épanouies qui vient me surprendre... Ses pétales semblent si doux, remplis d'une tendresse végétale. Alors les deux images se télescopent et j'adresse à l'homme tout de noir vêtu, la blancheur et la douceur enveloppante de ces pétales, comme si je pouvais l'entourer de ce drap végétal.

J'ai fait voyager cette fleur délicate jusqu'à lui. Pourvu qu'elle soit venue habiter ses rêves quelques instants...